En tant qu’auto-entrepreneur, calculer le montant de sa pension de retraite est indispensable pour bien anticiper la fin de sa carrière professionnelle. Toutefois, le calcul de la retraite en auto-entreprise connaît de nombreuses particularités. Caisse de retraite, cotisations, validation des trimestres ou encore valeur du point : découvrez tout ce qu’il faut savoir sur le sujet.
Quelle est la caisse de retraite des auto-entrepreneurs ?
Au moment de calculer le montant de votre pension, une première subtilité est à connaître : la retraite des auto-entrepreneurs est gérée par deux organismes différents, chacun avec ses propres règles.
La Cipav : l'organisme retraite d'une minorité d'auto-entrepreneurs libéraux
La Cipav, intervenant notamment auprès des auto-entrepreneurs, est un organisme en charge des régimes de retraite et de prévoyance de certaines professions libérales. Il s’occupe notamment de la retraite :
- des auto-entrepreneurs qui exercent l'une des 21 professions libérales réglementées : architecte, architecte d’intérieur, économiste de la construction, maître d’œuvre, géomètre-expert, ingénieur conseil, moniteur de ski, guide de haute montagne, accompagnateur de moyenne montagne, ostéopathe, psychologue, psychothérapeute, ergothérapeute, diététicien, chiropracteur, psychomotricien, artiste non affilié à la Maison des artistes ou à l’Agessa, expert devant les tribunaux, mandataire judiciaire à la protection des majeurs, expert en automobile et guide-conférencier ;
- des auto-entrepreneurs qui ont créé leur auto-entreprise libérale avant le 1er janvier 2018 et qui, depuis, n'ont pas demandé à être rattachés à la Sécurité sociale des indépendants (SSI).
Bon à savoir : les auto-entrepreneurs libéraux rattachés à la Cipav mais n'exerçant pas l'une des 21 professions réglementées ont jusqu'au 31 décembre 2023 pour demander leur rattachement à la SSI. Le choix entre la Cipav et la SSI doit cependant être mûrement réfléchi car :
- les deux organismes appliquent des règles différentes ;
- s’il est validé, le rattachement à la SSI est définitif.
La SSI : en charge de la retraite de la majorité des auto-entrepreneurs
Tous les auto-entrepreneurs qui ne dépendent pas de la Cipav sont rattachés à la Sécurité sociale des indépendants (SSI). Leur retraite est toutefois gérée par la Cnav ou la Carsat (selon l’activité exercée), les deux organismes appliquant des règles relativement similaires. Cela concerne donc :
- les auto-entrepreneurs artisans : maçon, plombier ou encore cuisinier ;
- les micro-entrepreneurs commercants : vendeurs, traiteur ou encore acheteur-revendeur de véhicules ;
- les auto-entreprises libérales non réglementées non rattachées à la Cipav : les activités créées après le 1er janvier 2018 ou qui ont demandé leur rattachement à la SSI.
Comment calculer la retraite de base d’un auto-entrepreneur à la SSI ?
Pour les auto-entrepreneurs rattachés à la SSI, le calcul de la retraite se fait de la même manière que pour les salariés. Il s'appuie sur 4 critères principaux.
1. Le revenu annuel moyen
Pour les auto-entrepreneurs nés à partir de 1953, le revenu pris en compte est la moyenne des 25 meilleures années d'activité, dans la limite d'un PASS.
2. Le taux de retraite
Les micro-entrepreneurs à la SSI profitent d'une retraite à taux plein, à savoir 50 % de la moyenne de leurs meilleurs revenus sur 25 ans, s'ils remplissent au moins l'une de ces conditions :
- ils ont l'âge de retraite au taux plein automatique, à savoir 67 ans pour les personnes nées après 1955 ;
- ils ont cotisé assez de trimestres, à savoir entre 160 et 172 selon l'année de naissance ;
- ils sont dans une situation particulière (handicapé, inapte au travail, etc.).
S'ils ne respectent aucune de ces conditions, les auto-entrepreneurs à la SSI peuvent malgré tout prendre leur retraite entre l'âge légal (62 ans) et l'âge du taux plein automatique (67). Ils se verront néanmoins appliquer une décote, diminuant le montant de la pension, sur 20 trimestres au maximum. Cette décote est de :
- 1,5 % par trimestre manquant pour les personnes nées en 1951 ;
- 1,375 % par trimestre manquant pour les personnes nées en 1952 ;
- 1,25 % par trimestre manquant pour les personnes nées à partir de 1953.
3. Le nombre de trimestres validés
Tout comme pour les salariés, les trimestres pris en compte pour le calcul de la retraite des auto-entrepreneurs sont :
- les périodes cotisées : à titre volontaire ou obligatoire ;
- les périodes assimilées : chômage, service militaire ou encore invalidité ;
- les majorations : pour pénibilité du travail ou enfants.
Bon à savoir : la validation des trimestres par l'auto-entrepreneur dépend du chiffre d'affaires réalisé à l'année. Dans le cas d'une activité de vente de marchandises par exemple, il faut réaliser au minimum* :
- 4 137 € pour valider 1 trimestre ;
- 7 286 € pour valider 2 trimestres ;
- 10 426 € pour valider 3 trimestres ;
- 20 740 € pour valider 4 trimestres.
* Montants applicables aux revenus de 2021. Dans l'attente de communication des seuils applicables pour les revenus de 2022.
4. La durée de référence
La durée de référence correspond au nombre de trimestres que l'auto-entrepreneur doit avoir cotisés pour bénéficier d'une retraite à taux plein. Cette durée dépend de votre année de naissance : elle est par exemple de 169 trimestres pour les personnes nées en 1965.
Année de naissance |
Durée de référence |
1950 |
162 |
1951 |
163 |
1952 |
164 |
1953-1954 |
165 |
1955-1957 |
166 |
1958-1960 |
167 |
1961-1963 |
168 |
1964-1966 |
169 |
1967-1969 |
170 |
1970-1972 |
171 |
À partir de 1973 |
172 |
Le calcul de la retraite de base des auto-entrepreneurs à la SSI
Pour les micro-entrepreneurs à la SSI, le montant de la pension de retraite est calculé grâce à cette formule :
Revenu annuel moyen × taux de retraite × (nombre de trimestres d'assurance validés / durée de référence)
Exemple : vous êtes auto-entrepreneur à la SSI et :
- votre revenu annuel moyen est de 30 000 € sur vos 25 meilleures années ;
- votre taux de retraite est de 47,50 % car il vous manque 2 trimestres (50 % - 1,25 % x 2) ;
- vous avez cotisé 165 trimestres ;
- vous êtes né en 1959 et votre durée de référence est donc de 167 trimestres.
> Votre retraite de base est donc de 14 079 € par an (30 000 € x 47,50 % x [165/167]), soit 1 173 € brut par mois.
Comment calculer la retraite complémentaire d’un auto-entrepreneur ?
La retraite complémentaire des indépendants (RCI) permet de compléter votre retraite de base d'auto-entrepreneur à la SSI. Elle est calculée en fonction des cotisations versées, celles-ci permettant d'accumuler un certain nombre de points en fonction d’une valeur d’achat variant chaque année. Lors du départ à la retraite, les points obtenus sont multipliés par la valeur du point pour obtenir le montant de la RCI.
Bon à savoir : pour l’année 2023 :
- la valeur d'achat du point est de 17,4316 € (1 point accumulé tous les 17,4316 € cotisés) ;
- la valeur du point est de 1,3498 € (1 point accumulé donne droit à 1,3498 €).
La retraite complémentaire est versée :
- en intégralité si l'auto-entrepreneur a obtenu sa retraite de base au taux plein ;
- en partie dans le cas contraire, via l'application d'abattements.
Exemple : vous avez cotisé 2 450 € au titre de la retraite complémentaire :
- vous avez donc 140,55 points (2 450 € / 17,4316 €) ;
- votre RCI est de 189,71 € (140,55 points x 1,3498 €) par an.
Comment calculer la retraite de base d’un micro-entrepreneur à la Cipav ?
À la différence des indépendants au RSI, la retraite des auto-entrepreneurs à la Cipav repose uniquement sur un système de points, à la fois pour le régime de base et complémentaire. Elle est calculée à partir de 4 éléments principaux.
1. Les cotisations retraite à la Cipav
Les cotisations sociales de l’auto-entrepreneur à la Cipav représentent 21,2 % de son chiffre d’affaires. Une partie de cette somme est allouée à la retraite, à savoir :
- 24,8 % des cotisations pour la tranche 1 de la retraite de base ;
- 5 % pour la tranche 2 de la retraite de base ;
- 19,8 % pour la retraite complémentaire.
Exemple : ayant un chiffre d'affaires annuel de 30 000 €, vous versez 6 360 € de cotisations sociales (30 000 € x 21,2 %). Ce montant sert notamment à financer la retraite à hauteur de :
- 1 577,28 € pour la tranche 1 de la retraite de base (6 360 € x 24,8 %) ;
- 318 € pour la tranche 2 de la retraite de base (6 360 € x 5 %) ;
- 1 259,28 € pour la retraite complémentaire (6 360 € x 19,8 %).
2. Les trimestres validés
Les auto-entrepreneurs à la Cipav valident 1 trimestre par tranche de chiffres d'affaires de 2 421 €, dans la limite de 4 trimestres par an (montants applicables aux revenus de 2022).
Chiffre d’affaires annuel |
Nombre de trimestres validés |
2 421 € |
1 |
4 842 € |
2 |
7 263 € |
3 |
9 684 € |
4 |
3. L’âge de départ à la retraite
L’âge de départ à la retraite a un impact sur le nombre de trimestres nécessaires pour avoir sa retraite à taux plein. Trois cas de figure sont possibles :
- si vous partez à l’âge légal autorisé mais que vous n’avez pas suffisamment de trimestres, une décote s’applique ;
- si vous avez accumulé assez de trimestres, vous bénéficiez d’une retraite à taux plein ;
- si vous partez à l’âge légal de la retraite à taux plein, vous profitez d’une retraite à taux plein, y compris si vous n’avez pas accumulé assez de trimestres.
Date de naissance |
Âge légal autorisé |
Nombre de trimestres pour le taux plein |
Âge légal de la retraite à taux plein |
Avant 1949 |
60 ans
|
160 |
65 ans
|
1949 |
161 |
||
1950 |
162 |
||
Avant le 1er juillet 1951 |
163 |
||
Du 1er juillet 1951 au 31 décembre 1951 |
60 ans et 4 mois |
163 |
65 ans et 4 mois |
1952 |
60 ans et 9 mois |
164 |
65 ans et 9 mois |
1953 |
61 ans et 2 mois |
165 |
66 ans et 2 mois |
1954 |
61 ans et 7 mois |
165 |
66 ans et 7 mois |
1955 à 1957 |
62 ans
|
166 |
67 ans
|
1958 à 1960 |
167 |
||
1961 à 1963 |
168 |
||
1964 à 1966 |
169 |
||
1967 à 1969 |
170 |
||
1970 à 1972 |
171 |
||
1973 et plus |
172 |
4. Le nombre de points accumulés
Les auto-entrepreneurs à la Cipav gagnent des points pour leur retraite de base et complémentaire en fonction du montant de cotisations reversées. Pour 2022, les taux de conversion sont les suivants :
- 1 point gagné pour 6,44 € cotisés pour la tranche 1 de la retraite de base ;
- 1 point gagné pour 153,84 € cotisés pour la tranche 2 de la retraite de base ;
- 1 point gagné pour 42,42 € cotisés pour la retraite complémentaire.
Il faut ensuite multiplier le nombre de points accumulés par la valeur du point (au moment du départ à la retraite) pour obtenir le montant de la retraite de base et complémentaire. Pour 2022, la valeur est de :
- 0,5795 € pour la retraite de base ;
- 2,63 € pour la retraite complémentaire.
Exemple : vous avez réalisé un chiffre d'affaires de 30 000 €, vous permettant d'acquérir 4 trimestres (car supérieur à 9 684 €) :
- vous versez 6 360 € de cotisations sociales (30 000 € x 21,2 %) ;
- vous cotisez à hauteur de :
- 1 577,28 € pour la tranche 1 de la retraite de base (6 360 x 24,8 %) ;
- 318 € pour la tranche 2 de la retraite de base (6 360 € x 5 %) ;
- 1 259,28 € pour la retraite complémentaire (6 360 € x 19,8 %) ;
- vous accumulez :
- 244,92 points pour la tranche 1 de la retraite de base (1 577,28 € / 6,44 €) ;
- 2,07 points pour la tranche 2 de la retraite de base (318 € / 153,84 €) ;
- 29,69 points pour la retraite complémentaire (1 259,28 € / 42,42 €).
Comment connaître ses droits à la retraite ?
Pour un auto-entrepreneur, le calcul des droits à la retraite peut vite s’avérer complexe, notamment en raison d'une carrière mixte (salarié et indépendant) ou de périodes d'inactivité par exemple. Heureusement, vous pouvez obtenir des informations personnalisées sur 2 sites officiels :
- l'Assurance Retraite pour organiser votre départ, estimer le montant de votre pension et demander votre retraite ;
- Info Retraite pour voir votre historique de carrière, contacter vos différents régimes de retraite, estimer votre pension de retraite, consulter votre âge de départ prévu et demander votre retraite.
Depuis ces deux sites, plusieurs démarches sont également à entreprendre pour bien préparer votre retraite :
- demander un relevé de carrière pour avoir une vision globale de l'ensemble des droits accumulés ;
- faire une demande de correctif si vous constatez des erreurs au sein de votre relevé de carrière ;
- estimer l'âge de votre départ à la retraite en fonction des trimestres que vous avez validés ;
- estimer le coût de rachat de trimestres (périodes de formations par exemple) pour évaluer l'intérêt de l'opération ;
- demander vos droits à la retraite afin de bénéficier de votre pension.